THÉMATIQUE

Qu'il s'agisse des mesures « temporaires et spéciales » du droit international, de la positive action du droit communautaire, de l'affirmative action de nombreux pays anglophones, ou de ce que l'on appelle en France la « discrimination positive », toutes visent à rétablir une égalité compromise par le creusement des inégalités socio-économiques d'une part, la généralisation ou la persistance de pratiques notamment sexistes d'autre part. Et toutes font le pari de promouvoir l'égalité par l'institution d'inégalités. Or, le recours à ces diverses formes de discrimination « bienveillante » peut sembler quelque peu paradoxal à l'heure où le principe de non-discrimination s'impose de manière toujours plus exigeante. À quelles conditions les politiques dites de rattrapage sont-elles acceptables? Au nom de quels principes justifier des politiques dont l'objet reste de favoriser, dans les faits, le progrès de l'égalité et de rendre effective, notamment, une égalité des sexes posée en principe constitutionnel, mais inachevée en pratique? Que faut-il, enfin, attendre de telles politiques?

Quoique dans des perspectives différentes, et quelle que soit la tradition juridique du pays concerné, force est de reconnaître que la question se pose aujourd'hui avec autant d'acuité aux États-Unis qu'en France ou au Japon. Grâce aux travaux de certains chercheurs, le cas des États-Unis et des politiques d'affirmative action introduites dans ce pays depuis la fin des années soixante est maintenant mieux connu en France, mieux compris aussi. En France, où le débat porte plus spécifiquement sur la compatibilité entre les politiques de discrimination positive et les principes républicains français d'universalité des prestations, d'égalité devant le service public, d'égalité dans l'accès aux emplois publics, et d'indifférenciation du corps politique, les travaux de Gwénaële CALVÈS, en particulier, permettent d'enrichir doublement la réflexion sur la signification et les enjeux de l'affirmative action américaine, et sur la « discrimination positive » à la française. Au Japon, les travaux de certains universitaires s'attachent à comparer les différentes politiques d'affirmative action, de positive action ou de discrimination positive. C'est ainsi, par exemple, qu'a été publié l'année dernière aux Presses universitaires de Tohoku, et sous la direction du Professeur Miyoko TSUJIMURA, un ouvrage traitant de la question sous l'angle aussi bien théorique que pratique. Intitulé Les politiques dites de « positive action » dans le monde et la participation égalitaire (Sekai no positivu akushon to danjokyôdô sankaku), cet ouvrage collectif cherche à faire le point sur les politiques développées au Japon, aux États-Unis, au sein de l'Union européenne, en France, en Allemagne, en Angleterre, et en Afrique du Sud, tout en abordant une pluralité de thèmes (quotas et participation politique, développement international, prestations sociales, fonction publique,...).

Continuer à confronter expériences et points de vue, tout en essayant de sensibiliser davantage le public français aux différents aspects du développement des politiques de positive action au Japon, tel fut précisément l'objectif de la conférence co-organisée par le Gender Law and Policy Center de l'Université de Tohoku (Japon) et la Société de Législation Comparée. Le Gender Law and Policy Center, à qui revient l'initiative de cette conférence, et dont c'est la première manifestation en France, n'aurait pu espérer trouver meilleur partenaire pour la co-organisation de cet évènement que la prestigieuse Société de Législation Comparée.